Rémi Bolduc le battant

Photo: Maxime Tremblay Curieux sur le plan musical, le saxophoniste Rémi Bolduc fréquente les grands artistes, comme le pianiste Kenny Werner et le saxophoniste Jerry Bergonzy.
On aime bien Rémi Bolduc. On l’aime bien parce que c’est un battant, un travailleur, un homme de projetS avec un grand S, un actif, un homme qui avance avec constance, qui ne se laisse pas décourager par la somme d’adversités inhérentes à l’univers du jazz. On aime bien Rémi Bolduc parce qu’il compose, il arrange, il transcrit jour après jour les morceaux écrits par les anciens comme par les modernes, parce qu’il enseigne depuis des lunes, parce que sur son instrument, le saxophone, il sculpte davantage le son qu’il ne le joue.
On aime bien Bolduc parce qu’il est au jazz d’aujourd’hui ce que fut le très regretté Bernard Primeau au jazz d’hier. Mais encore? Dans les années 60 et les suivantes, le batteur Primeau était ce que l’on a décliné à propos de Bolduc. C’est d’ailleurs auprès de lui que Bolduc a véritablement fait ses premières armes. Qu’il a appris davantage que les rudiments du métier.
Lors d’un entretien en vue de sa prestation dans le cadre de Jazz en rafale, le saxophoniste a confié: «Lorsqu’il était à l’hôpital, j’allais évidemment le voir. Alexandre [NDLR: Alexandre Côté, saxophoniste alto] également. Toujours est-il qu’il nous disait: “J’ai fait mon temps. Ce qu’il m’intéresse de savoir, c’est sur quel projet tu travailles.” Il nous posait beaucoup de questions sans jamais s’apitoyer sur son sort. C’était un grand monsieur.»
Chez Bolduc il y a donc du Primeau. On devrait même souligner, cela paraîtra curieux de prime abord, qu’il y a aussi du Buddy Johnson, immense saxophoniste, dont le célèbre producteur Norman Granz disait: «Quand Buddy est dans le studio, vous êtes tranquille parce que vous savez qu’il va faire travailler les autres. Qu’il va tout faire pour qu’ils sortent le meilleur d’eux-mêmes.»
Bolduc dit Rémi se distingue également par une inclination très prononcée pour la curiosité. Plus exactement, celle qui le pousse à fréquenter des musiciens qui sont aussi de grands artistes. On pense au pianiste Kenny Werner et au saxophoniste Jerry Bergonzy. «Kenny m’a beaucoup appris sur moi. Lors des répétitions, il s’est toujours montré très généreux de ses conseils. Il m’a fait découvrir des facettes de mon jeu.» Et Bergonzy? «C’est un très grand musicien. Un musicien de musiciens [“A musicians’ musician”]. Il est très inspirant.»
Pour son show du 22 mars à L’Astral, il a puisé dans le répertoire d’un musicien de musiciens. La programmation de Jazz en rafale ayant été conçue à l’aune de la contrebasse, Bolduc s’est attelé à la transcription de pièces écrites par le très influent Oscar Pettiford: Tricotism, Bohemia After Dark, etc. «Ce sera un concert plus “straight ahead” que d’habitude.» Il sera accompagné par les excellents Dave Laing à la batterie et André White au piano. Et à la contrebasse? Il a invité le gentleman fait homme, soit le Torontois Dave Young, qui a longtemps accompagné Oscar Peterson et Oliver Jones en plus d’avoir joué, tenez-vous bien, avec Clark Terry, Harry «Sweets» Edison, Hank Jones, Cedar Walton, Barry Harris, Zoot Sims, James Moody, etc. Concluons par une lapalissade: c’est à voir et à entendre. ~ Le Devoir, par Serge Truffaut, 10 mars 2012